2.4.09

Guerilla Kit


"Guérilla Kit" : le guide pratique du parfait petit agitateur altermondialiste. Un livre-objet, à monter soi-même, une trousse à outils à utiliser pour bricoler ses propres armes. Y sont rassemblées les ruses les plus subtiles de Morjane Baba qui, depuis des années, arpente les maquis des luttes sociales. L'ouvrage fournit ainsi au militant du siècle, des techniques de contestation, des méthodes de désobéissance et des stratagèmes de subversion, glanés un peu partout, au fil des combats. Du kiss-in (action voluptueuse) au vomit-in en passant par le hacktivisme (de hacker), "Guerilla Kit" répertorie tous les gags et chausse-trapes testés sur le terrain. Mais il raconte aussi, en guise d'illustrations, des histoires, des légendes et des vérités, de celles dont on voudrait être le héros, où il est question de grandes batailles, de pirates, de Robins des Bois, de fées roses, de tortues rebelles et d'Ewoks insurgés contre l'Empire...

Née dans ces chemins de résistance, portée par l'insurrection des Indiens du Chiapas, militante invétérée lors des contre-sommets de Seattle, Buenos Aires, Porto Alegre, Gênes ou Barcelone, Morjane Baba est née partout en même temps, sans patrie ni frontière. "Elle ne croit pas dans la légalité illégitime, elle trouve le moyen de le dire et renverse les rôles, elle change le monde en somme, par bribes et aussi dans les grands vacarmes du monde. Elle a été femme de ménage, fée, magicienne, ouvrière en grève, voleuse, pirate, navigatrice au long cours, poète, fleuriste et jardinière, personnage de carnaval, marionnette palpitante. Elle est rose fushia parce que frivole, rouge et noire parce que libertaire et révolutionnaire, violette parce que féministe, verte parce qu'écologiste, arc-en-ciel parce que pacifiste et homosexuelle, et dorée, argentée, et couverte de paillettes parce que ça brille".

" Utopies Pirates " - Hakim Bey

Utopies pirates
(H. Bey)

Au XVIIIe siècle, les pirates et les corsaires créèrent un «réseau d'information» à l'échelle du globe: bien que primitif et conçu essentiellement pour le commerce, ce réseau fonctionna toutefois admirablement. Il était constellé d'îles et de caches lointaines où les bateaux pouvaient s'approvisionner en eau et nourriture et échanger leur butin contre des produits de luxe ou de première nécessité.
Certaines de ces îles abritaient des «communautés intentionnelles», des micro-sociétés vivant délibérément hors-la-loi et bien déterminées à le rester, ne fût-ce que pour une vie brève, mais joyeuse.Il y a quelques années, j'ai examiné pas mal de documents secondaires sur la piraterie, dans l'espoir de trouver une étude sur ces enclaves - mais il semble qu'aucun historien ne les ait trouvées dignes d'être étudiées (William Burroughs et l'anarchiste britannique Larry Law en font mention - mais aucune étude systématique n'a jamais été réalisée).
J'en revins donc aux sources premières et élaborai ma propre théorie. Cet essai en expose certains aspects. J'appelle ces colonies des «Utopies Pirates».Récemment Bruce Sterling, un des chefs de file de la littérature Cyberpunk, a publié un roman situé dans un futur proche. Il est fondé sur l'hypothèse que le déclin des systèmes politiques générera une prolifération décentralisée de modes de vie expérimentaux: méga-entreprises aux mains des ouvriers, enclaves indépendantes spécialisées dans le piratage de données, enclaves socio-démocrates vertes, enclaves Zéro-travail, zones anarchistes libérées, etc. L'économie de l'information qui supporte cette diversité est appelée le Réseau; les enclaves sont les Iles en Réseau (et c'est aussi le titre du livre en anglais: Islands in the Net).
Les Assassins du Moyen Âge fondèrent un «État» qui consistait en un réseau de vallées de montagnes isolées et de châteaux séparés par des milliers de kilomètres. Cet État était stratégiquement imprenable, alimenté par les informations de ses agents secrets, en guerre avec tous les gouvernements, et son seul objectif était la connaissance. La technologie moderne et ses satellites espions donnent à ce genre d'autonomie le goût d'un rêve romantique. Finies les îles pirates! Dans l'avenir, cette même technologie - libérée de tout contrôle politique - rendrait possible tout un monde de zones autonomes. Mais pour le moment ce concept reste de la science-fiction - de la spéculation pure.
Nous qui vivons dans le présent, sommes-nous condamnés à ne jamais vivre l'autonomie, à ne jamais être, pour un moment, sur une parcelle de terre qui ait pour seule loi la liberté ? Devons-nous nous contenter de la nostalgie du passé ou du futur? Devrons-nous attendre que le monde entier soit libéré du joug politique, pour qu'un seul d'entre nous puisse revendiquer de connaître la liberté? La logique et le sentiment condamnent une telle supposition. La raison veut qu'on ne puisse se battre pour ce qu'on ignore; et le coeur se révolte face à un univers cruel, au point de faire peser de telles injustices sur notre seule génération.Dire : «Je ne serai pas libre tant que tous les humains (ou toutes les créatures sensibles) ne seront pas libres» revient à nous terrer dans une espèce de nirvana-stupeur, à abdiquer notre humanité, à nous définir comme des perdants.Je crois qu'en extrapolant à partir d'histoires d'«îles en réseau», futures et passées, nous pourrions mettre en évidence le fait qu'un certain type d'«enclave libre» est non seulement possible à notre époque, mais qu'il existe déjà. Toutes mes recherches et mes spéculations se sont cristallisées autour du concept de «zone autonome temporaire» (en abrégé TAZ).
En dépit de la force synthétisante qu'exerce ce concept sur ma propre pensée, n'y voyez rien de plus qu'un essai (une «tentative»), une suggestion, presque une fantaisie poétique. Malgré l'enthousiasme ranteresque de mon langage, je n'essaie pas de construire un dogme politique. En fait, je me suis délibérément interdit de définir la TAZ - je me contente de tourner autour du sujet en lançant des sondes exploratoires.
En fin de compte, la TAZ est quasiment auto-explicite. Si l'expression devenait courante, elle serait comprise sans difficulté... comprise dans l'action.

Loi Hadopi - Quel pirate êtes vous ?

Le capitaine corsaire (ou l’ami qui vous veut du bien)

Au travail, Gérard est un type sur lequel on peut compter. Avant, il faisait passer des catalogues de Noël où tout le service commandait du foie gras ou du Crémant d’Alsace. Depuis 1998, Gérard est devenu un pro de la piraterie sur Internet. Il n’a aucune intention maléfique mais fait tourner en permanence 5 PC récupérés à droite à gauche. Il télécharge en moyenne 31 films par semaine, 127 albums (il aime Metallica, Julien Clerc et les compilations de rock des années 70), en regarde 3 ou 4, parce qu’il faut avouer qu’il y a de ces merdes, mais les grave tous sans exception. Gérard n’a jamais vendu quoi que ce soit et ne se considère pas comme un criminel. Sa plus grande joie, c’est de vous croiser le matin au café et de vous entendre parler de Wall.E, le film que vos enfants rêvent de voir et que vous avez raté lors de sa sortie en salles. "Ca te dirait que je te le grave ?" Ah oui, ce serait cool. Le lendemain, il vous amène le DVD à la première heure. "Tiens je t’ai mis aussi le Royaume Interdit avec Jackie Chan et Jet Li. Et l’intégrale de Johnny Hallyday en 72 CD. Tu sais que ça m’a pris une semaine à télécharger cette saloperie. Franchement ça vaut le coup. T’aimes bien Johnny Cash ?"


Le boucanier noir (ou le petit entrepreneur)

Dans la galerie des pirates, c’est le plus nuisible. Le boucanier noir dispose d’une batterie de PC au moins aussi impressionnante que le capitaine corsaire. Il a, en plus, un réseau local qui dirige automatiquement le tout vers une minicentrale logistique. Il commande ses CD et DVD vierges par lot de 500 sur un site taïwanais. Sa femme et sa fille l’aident le samedi matin à emballer les lots qu’il a vendus sur ebay. Parmi ses meilleures ventes, les intégrales de série TV américaines (24 heures, Urgences, Dr House) continuent de faire un malheur. Sa "petite affaire", comme il l’appelle, lui rapporte, les bons mois, jusqu’à 400 euros. Il n’envisage pas d’en faire un métier mais ne pourrait plus se passer de ce revenu d’appoint. Lorsque la dernière loi sur le téléchargement illégal a été votée, il a mis la pédale douce pendant une bonne dizaine de jours avant de rechuter : "Impossible de mettre la main sur le deuxième Mesrine, putain, et j’en ai déjà vendu vingt sept". C’est la plaie du business : la faiblesse des équipes de piratage franchouilles. Depuis qu’il s’est engagé dans le piratage, il n’a plus une minute à lui. Plus de ciné, plus de télé, plus de concerts. La culture, c’est fini.


L'amateur butineur (ou le romantique)

Il a adapté sa consommation de disques et de films au nouveau marché. Il suit la presse musicale et cinéma de près et récupère les albums de ses groupes préférés en leak sur le net avant leur sortie. Il achète moins qu’avant mais a réussi ainsi à faire le tri dans sa discothèque. Ca fait un bail qu’il n’a pas acheté un mauvais disque. Fini les erreurs de casting, les petits chouchous de la presse spécialisée, les hypes qui ne passent pas la semaine. Il télécharge un peu, beaucoup parfois, histoire de se tenir au courant et de découvrir les groupes dont il a entendu parler sur le net. Grâce au piratage, il a découvert et redécouvert des groupes de son adolescence comme New Order ou Can mais s’est aussi mis au jazz et à la techno. Le weekend dernier, lui et sa copine se sont matés les 7 premiers épisodes de la saison 5 de Desperate Housewives. Ils n’auraient jamais fait ça avant mais les mecs de la télé l’ont provoqué : ils ont 2 saisons de retard et programment Heroes à 23H20. La peur du gendarme ? Ce n’est pas trop son truc. Il a le piratage modeste et sait que statistiquement, il est très peu probable que cela tombe sur lui.


Le collectionneur d’épaves (ou l’obsédé)

Il a connu l’époque où, sur les marchés, on vendait des disques pirates de ses groupes préférés à 245 francs le double album. Quand Internet est arrivé, sa vie a basculé. En douze mois, il a mis la main sur 416 concerts des Rolling Stones. Il lui en reste à peu près autant à récupérer mais il a décidé de prendre le temps et ne s’en fait plus qu’un par semaine. Il n’avouera jamais que la profusion a quelque peu tué le plaisir Il ne lui viendrait pas à l’idée de télécharger autre chose que des albums des Rolling Stones. Son neveu est un fan des Smiths : il a réussi récemment à compléter la tournée 1985 et a acheté un concert ultrarare des Nosebleeds à un Brésilien. "A ce degré de spécialisation ou de passion, le piratage n’est pas un délit, c’est un art. De toute façon, je ne vois pas où est le mal ? La plupart des trucs que je récupère ne sont jamais sortis dans le commerce. Et de toute façon, j’achète tout ce que mon groupe favori sort. Alors qu’est-ce qu’on me reproche au juste ?" Pour les collectionneurs, le piratage est l’Eden dont on n’osait même pas rêver il y a dix ans.


Le pirate d’eau douce dit le honteux

Il a commencé à pirater par hasard. C’était un mardi après la classe. Il a entendu le dernier titre de Laurent Voulzy à la radio. Le marchand de disques lui a dit qu’il ne sortirait que dans 4 semaines. Quand il est rentré chez lui, il est tombé sur un site de partage. Après quatre ou cinq écoutes, il s’est essayé à rapatrier le titre sur son ordinateur. Impossible de ne pas prendre l’album entier. Cela n’a pris que 32 minutes la première fois. Quelques minutes après, il a eu un remords et a détruit les fichiers pirates de son disque dur et vidé la corbeille, avant de les récupérer deux jours après. Bien sûr, lorsque l’album est sorti, il l’a acheté tout de suite. Il s’est rendu compte qu’il le connaissait déjà par cœur et n’avait pas le même plaisir à le découvrir. Peu à peu, il est parvenu à ne pas se sentir coupable et à oublier qu’il faisait un tort immense aux artistes. "Je ne suis pas un gros poisson. Je ne vois pas pourquoi ils s’en prendraient à moi." Quand le téléphone sonne et qu’il est dans son bureau, il sursaute comme si on défonçait la porte.


Le Paranopirate ou Go Fast

D’entre tous les pirates, c’est celui qui est le plus conscient de faire le Mal. Pirater vous expose à des sanctions exemplaires. Et pourquoi on le fait quand même ? On nous observe. La messagerie n’est pas un moyen sûr de communication. Le gouvernement français s’est équipé d’un supercalculateur dans la Somme qui brasse les millions d’adresses IP et est capable de savoir où habite l’ensemble des types qui téléchargent de la musique illégalement. Les maisons de disques rémunèrent des brigades du net qui chattent avec vous et essaient de connaître vos goûts et vos habitudes. "Du coup, vous faites comme vous voulez, mais moi, je ne m’y risque pas sans avoir pris mes précautions". Avant de parvenir sur son disque dur, les signaux numériques passent par l’Ukraine, la Belgique et rebondissent sur un serveur cache dans le Périgord. Il a pris un second abonnement internet au nom de son beau-père, qui a 98 ans, pour brouiller les pistes. Après chaque téléchargement, il entre dans Windows pour effacer les traces et planque les disques gravés dans une niche taillée sous l’escalier.


Le lutineur (ou le teen boucanier)

Il a 13, 14 ans. Acheter un disque ne lui est jamais venu à l’esprit mais il a quelques CD que son oncle lui a offerts à Noël et dont il n’est pas fier. On le présente comme un pirate mais il incarne l’avenir de la consommation de musique sur le net. Ce qu’il aime, c’est les singles, les titres qui pètent et qu’on peut ensuite customiser en sonneries de portable. Il lui en est déjà arrivé quelques unes par SMS. La musique, il adore ça mais en vrac : il aime le hip-hop, le metal et tout ce qui déchire. Il ne crache pas sur le rap américain et écoute aussi des musiques de pub. Il a eu sa période Tokyo Hotel mais a les boules quand on lui en parle désormais. Dans son monde, la notion de groupe ou d’œuvre n’a pas de consistance. D’ailleurs, il n’a pas un fichier gravé avant 2006. "La musique, il dit, c’est comme les yaourts. Tu peux l’écouter quelques jours après la date de sortie, mais après, tu risques de te choper la diarrhée, alors je prends, je jette, tu vois le style ?". Dans un an ou deux, il redécouvrira la collection de CD de son frère ou de son père et virera sa cuti. Il trouve ça con qu’on fasse reposer tout le système économique sur sa pomme. "S’il fallait payer, j’écouterais plutôt mon cœur battre, tu vois, et je ne me sens pas de continuer ainsi toute ma vie. Ca prend trop de temps de télécharger. Je préfère me greffer sur une webradio, à la rigueur, et sentir le vent pousser".


1.4.09

Mercredi 08 Avril - Delinquants Solidaires


Délinquants solidaires : Mercredi 08 Avril 2009

Si la solidarité devient un délit, nous demandons à être poursuivis pour ce délit ! Mercredi 8 avril dans plusieurs dizaines de villes en France, des milliers de personnes se rendront devant les différents palais de justice pour se constituer prisonniers. Parce qu’aujourd’hui, en France, accueillir, accompagner ou simplement aider une personne sans‐papiers est devenu un délit…


Comme le précise l’article L 622‐1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France sera puni d’un emprisonnement de 5 ans et d’une amende de 30 000 euros ».
Parce que le gouvernement français s’est donné comme objectif en 2009, l’interpellation de 5000 aidants et de 5 500 en 2011, en assimilant citoyens solidaires et militants bénévoles aux trafiquants de main d’oeuvre et autres passeurs….


Mercredi 8 avril, nous serons donc des milliers affirmant avoir un jour aidé un homme ou une femme sans papiers en difficulté. Nous serons des milliers de citoyens décidés à rester des « aidants » et à affirmer que l’humanité et la solidarité sont des principes supérieurs sans lesquels il n’y a pas de société digne de ce nom.



" Un potlach immédiatiste " - Hakim Bey

Un potlatch immédiatiste
(H. Bey)

1. Le nombre des participants peut varier, mais il doit être déterminé à l’avance.

2. La structure de base est un banquet ou un pique-nique. Chaque participant doit apporter nourriture ou boisson, etc..., en quantité suffisante pour que tout le monde soit servi au moins une fois. Les plats peuvent être préparés ou terminés sur place, mais on s’abstiendra d’apporter des produits préparés commercialement (sauf le vin & la bière, bien que, dans l’idéal, ceux-ci devraient être élaborés chez soi). Il est essentiel que les plats soient le plus recherchés possibles. Efforcez-vous d’être mémorable. Il n’est pas nécessaire que le menu soit une surprise (bien que cette option puisse rester ouverte). Certains groupes peuvent préférer coordonner le banquet, ceci dans le but d’éviter les duplications et les combinaisons malheureuses. Peut-être est-il bon d’organiser le banquet autour d’un thème, chaque participant étant responsable d’un plat particulier (amuse-gueule, soupe, poisson, légumes, viande, salade, dessert, glaces, fromages, etc.). Exemples de thèmes : La Gastrosophie de Fourier, le Surréalisme, les Amérindiens, Noir & Rouge (tous les plats seraient de couleur rouge ou noire, en l’honneur de l’anarchie), etc...

3. Le banquet devrait comporter un certain degré de cérémonie : on portera des toasts, par exemple. Peut-être serait-ce une bonne idée de "s’habiller pour dîner ", d’une façon ou d’une autre ? (Imaginez par exemple que le thème du banquet soit "le Surréalisme". Le concept "s’habiller pour dîner" prendrait dans ce cas un sens bien particulier). Il est possible de faire jouer des musiciens durant le banquet, à la condition que certains d’entre eux acceptent d’offrir leur musique aux autres convives en tant que "cadeau" & acceptent de manger plus tard. (La musique enregistrée est à exclure).

4. Le but principal du Potlatch est, bien sûr, l’échange de cadeaux. Chaque participant doit arriver avec un ou plusieurs cadeaux & repartir avec un ou plusieurs cadeaux différents. Ceci peut être accompli de plusieurs façons : a) chaque participant apporte un cadeau qu’il offrira à la personne assise près de lui à table (ou tout autre arrangement similaire) ; b) chacun apporte un cadeau pour chacun des autres convives.
Le choix peut dépendre du nombre des participants, l’option a) convenant mieux aux grands groupes et l’option b) aux petits rassemblements. Si l’on a choisi b), il peut être bon de décider à l’avance si les cadeaux seront tous de même nature ou s’ils seront différents. Par exemple, si je joue avec cinq autres personnes, vais-je apporter, disons cinq cravates peintes à la main ou bien cinq cadeaux totalement différents ? Les cadeaux seront-il offerts à des personnes spécifiques ? ( auquel cas ils pourraient être choisis en fonction de la personnalité du destinataire) ou bien seront-ils distribués au hasard ?

5. Les cadeaux doivent être l’oeuvre des participants, et non pas des articles manufacturés. Ce point est essentiel. Certains éléments pré-manufacturés peuvent entrer dans la fabrication des cadeaux, mais chaque cadeau doit être une oeuvre d’art en soi. Si, par exemple, j’apporte cinq cravates peintes à la main, je devrai peindre chacune moi-même, du même motif ou de motifs différents. Il me sera permis, toutefois, d’acheter des cravates toute faites qui serviront de support à mon travail.

6. Les cadeaux n’ont pas nécessairement besoin d’être des objets physiques. Un participant peut offrir de jouer de la musique durant le dîner, un autre peut jouer une scène. Il faut néanmoins se rappeler que dans le potlatch amérindien, les cadeaux se devaient d’être superbes, et même ruineux pour les donateurs. A mon sens, ce sont les objets physiques qui conviennent le mieux, & ils est important qu’ils soient aussi beaux que possible - pas nécessairement coûteux à fabriquer, mais vraiment impressionnants. Le potlatch traditionnel était une occasion de gagner du prestige. Il est important que les participants fassent preuve d’un désir de compétition dans le choix de leurs présents, d’une détermination à offrir des cadeaux d’une réelle splendeur ou de grande valeur. Certains groupes peuvent vouloir discuter de ce point à l’avance - certains parmi eux peuvent insister pour que les cadeaux soient des objets physiques, auquel cas musique ou représentation théâtrale deviendraient simplement des actes de générosité supplémentaires, mais hors-potlatch, pour ainsi dire.

7. Notre potlatch, toutefois, est non-traditionnel par le fait que, théoriquement, tous les participants gagnent - chacun donne et reçoit également. Il est certain, néanmoins, qu’un convive ennuyeux ou pingre perdra de son prestige, alors qu’un joueur imaginatif et/ou généreux verra le sien augmenter. Dans un potlatch vraiment réussi, chaque participant se montrera également généreux pour que tous se sentent contents. L’incertitude du résultat final ajoute un soupçon de hasard à l’événement.

8. L’hôte, qui procure le lieu, peut bien sûr s’attendre à des soucis et des dépenses supplémentaires, aussi un potlatch idéal devrait-t-il faire partie d’une série dans laquelle chaque participant sert d’hôte à son tour. Cette série serait l’occasion d’une nouvelle compétition : Qui offrira l’hospitalité la plus mémorable ? Certains groupes peuvent choisir d’établir des règles visant à limiter les devoirs de l’hôte, alors que d’autres désireront laisser celui-ci libre de s’en donner à coeur joie. Dans ce dernier cas, toutefois, il conviendra d’organiser une série complète d’événements, pour que nul ne se sente lésé par les autres ou supérieur à eux. Mais, dans certaines régions & pour certains groupes, toute la série serait impossible à compléter pour des raisons de faisabilité. À New York, par exemple, tout le monde ne bénéficie pas de l’espace nécessaire pour accueillir même un petit groupe. Dans ce cas, les hôtes gagneront inévitablement un prestige supplémentaire. Et pourquoi pas ?

9. Les cadeaux ne devront en aucun cas être "utile", mais devront être agréables pour les sens. Certains groupes peuvent préférer des oeuvres d’art, d’autres des conserves maison & des bocaux de cornichons, ou de l’or de l’encens et de la myrrhe, ou même des actes sexuels. Il convient de s’accorder à l’avance sur quelques règles de base. Les offrandes de cadeaux ne doivent pas faire l’objet de quelque médiation que ce soit - pas de vidéocassettes, pas d’enregistrements sonores, textes imprimés, etc. Tous les cadeaux doivent être présents sur le lieu de la cérémonie du potlatch : pas de billets pour d’autres événements, pas de promesses, pas de remises à plus tard. Souvenez-vous que le but du jeu et sa règle la plus essentielle consiste à éviter toute médiation & même toute représentation - Etre "présent", pour offrir des "présents".

" Le terrorisme poétique " - Hakim Bey

Le terrorisme poétique
(H. Bey)

C’est une danse étrange et nocturne dans les guichets automatiques des banques. Des feux d’artifice tirés illégalement. L’art paysager, des travaux de terrassement, ou des objets bizarres dans les Parcs Publics. Rentrez par effractions dans des maisons, mais au lieu de les cambrioler, laissez-y des objets de terrorisme poétique. Kidnappez quelqu’un et rendez-le heureux. Prenez une personne au hasard et persuadez-la qu’elle vient d’hériter d’une fortune colossale, inutile et surprenante - 1000 hectares en Antarctique, un éléphant de cirque trop vieux, un orphelinat à Bombay, ou une collection de vieux manuscrits alchimiques. Cette personne réalisera plus tard que durant un moment, elle a cru en quelque chose d’extraordinaire, et elle sera peut-être amenée à rechercher un autre mode de vie, plus intense.
Erigez des plaques commémoratives en cuivre dans les endroits (publiques ou privés) où vous avez connu une révélation ou une expérience sexuelle particulièrement satisfaisante...

Go naked for a sign.

Organisez une grève dans votre école ou sur votre lieu de travail sous prétexte que vos besoins en indolence et en beauté spirituelle n’y sont pas satisfaits.

Les graffitis apportent une certaine grâce aux métros si laids et aux monuments publiques si rigides - le Terrorisme Poétique peut également servir dans les endroits publiques : des poèmes gribouillés dans les toilettes des palais de justice, de petits fétiches abandonnés dans les parcs et les restaurants, des photocopies artistiques placées sous les essuie-glaces des pare-brise des voitures en stationnement, des Slogans écrits en Caractères Enormes collés sur les murs des cours de récréations ou des aires de jeux, des lettres anonymes postées au hasard ou à des destinataires sélectionnés (fraude postale), des émissions radio pirates, du ciment humide....
La réaction du public ou le choc esthétique produit par le Terrorisme Poétique devra être au moins aussi intense que le sentiment de terreur - de dégoût puissant, de stimulation sexuelle, de crainte superstitieuse, d’une découverte intuitive subite, d’une peur dadaesque - il n’est pas important que le Terrorisme Poétique soit destiné à une ou plusieurs personnes, qu’il soit " signé " ou anonyme, car s’il ne change pas la vie de quelqu’un (hormis celle de l’artiste), il échoue.

Le Terrorisme Poétique n’est qu’un acte dans un Théâtre de la Cruauté qui n’a ni scène, ni rangées, ni sièges, ni tickets, ni murs. Pour fonctionner, le Terrorisme Poétique doit absolument se séparer de toutes les structures conventionnelles de consommation d’art (galeries, publications, médias). Même les tactiques de guérillas Situationnistes comme le théâtre de rue sont peut-être actuellement trop connues et trop attendues.

Une séduction raffinée, menée non seulement dans l’optique d’une satisfaction mutuelle, mais également comme un acte conscient dans une existence délibérément belle - pourrait être l’acte ultime de Terrorisme Poétique.

Le Poète Terroriste se comporte comme un farceur de l’ombre dont le but n’est pas l’argent mais le changement.

Ne pratiquez pas le Terrorisme Poétique pour d’autres artistes, faites le pour des gens qui ne réaliseront pas (du moins durant quelque temps) que ce que vous avez fait est de l’art. Evitez les catégories artistiques identifiables, évitez la politique, ne traînez pas pour éviter de raisonner, ne soyez pas sentimentaux ; soyez sans pitié, prenez des risques, pratiquez le vandalisme uniquement sur ce qui doit être défiguré, faites quelque chose dont les enfants se souviendront toute leur vie - mais ne soyez pas spontanés à moins que la Muse du Terrorisme Poétique ne vous possède.

Déguisez-vous. Laissez un faux nom. Soyez mythique. Le meilleur Terrorisme Poétique va contre la loi, mais ne vous faites pas prendre. L’art est un crime ; le crime est un art.

" Le Sabotage Artistique " - Hakim Bey


Le Sabotage Artistique
(H.Bey)

Le Sabotage Artistique cherche à être parfaitement exemplaire mais en même temps garde une certaine forme d’opacité - pas de la propagande mais un choc esthétique - directement attirant tout en étant subtilement présenté - l’action comme métaphore.

Le Sabotage Artistique est le côté obscur du Terrorisme Poétique - la création par la destruction - mais il ne peut servir aucun Parti, ni aucune forme de nihilisme, ni même l’art. Tout comme le bannissement de l’illusion amplifie la conscience, la démolition du fléau esthétique adoucit l’air du monde du discours, de l’Autre. Le Sabotage Artistique sert uniquement la conscience, l’attention, l’éveil.

Le Sabotage Artistique transcende la paranoïa, la déconstruction - la critique ultime - l’attaque physique sur l’art nauséabond - le djihad esthétique. La moindre trace du plus insignifiant égoïsme ou même de goût personnel abîme sa pureté et vicie sa force. Le Sabotage Artistique ne cherche jamais le pouvoir - il ne fait que le libérer.

Les réalisations artistiques individuelles (même les pires) sont largement hors de propos - le Sabotage Artistique cherche à détruire les institutions qui utilisent l’art afin de diminuer la conscience et le profit par l’illusion. Tel ou tel poète ou peintre ne peut être condamné pour manque de vision - mais les Idées pernicieuses peuvent être combattues par les objets qu’elles génèrent. La musique de supermarché est destinée à hypnotiser et à contrôler - on peut détruire son mécanisme.

Les autodafés de livres - pourquoi les rednecks et les Douaniers devraient-ils avoir le monopole de cette arme ? Les histoires d’enfants possédés par le diable ; la liste des best-sellers du New York Times ; les tracts féministes contre la pornographie ; les livres scolaires (plus particulièrement les livres d’études sociales, civiques, de Santé) ; des piles de New York Post, Village Voice et autres journaux de supermarché ; un choix de glanures de publications chrétiennes ; quelques romans de la collection " Arlequins " - une atmosphère festive, du vin des joints passant de mains en mains par un bel après-midi d’automne.

Jeter de l’argent à la Bourse fut un acte intéressant de Terrorisme Poétique - mais détruire l’argent aurait été un excellent acte de Sabotage Artistique. Pirater les émissions TV et y programmer quelques minutes de Chaos incendiaire constituerait un exploit de Terrorisme Poétique - alors que faire exploser la tour de transmission serait un Sabotage Artistique parfaitement adéquat. Si certaines galeries et musées méritent qu’on lance à l’occasion un pavé dans leurs vitrines - pas de destruction, mais une décharge d’autosatisfaction - alors qu’en est-il des banques ? Les galeries transforment la beauté en produit, mais les banques transmutent l’Imagination en déchets et en dettes. Le monde n’y gagnerait-il pas plus en beauté à chaque banque qui tremble... ou s’écroule ? Mais comment y parvenir ? Le Sabotage Artistique devrait probablement se tenir à l’écart de la politique (c’est si ennuyeux) - mais pas des banques.

Ne faites pas grève - pratiquez le vandalisme. Ne protestez pas - défigurez. Lorsque l’on vous impose la laideur, de mauvaises conceptions et un gaspillage stupide, contestez, et lancez votre chaussure dans les oeuvres, ripostez. Brisez les symboles de l’Empire au nom de rien si ce n’est l’envie de grâce du coeur.

" L'art du Chaos " - Hakim Bey


Notre époque est caractérisée par l'isolement de plus en plus poussé de l'individu qui tend à n'avoir de contact avec la réalité qu'à travers son écran de télévision ou d'ordinateur. Sous ses aspects politiques, sociaux, culturels, la médiatisation est devenue la meilleure garante de notre exploitation par le nouvel ordre mondial dont Internet est le dernier et combien inquiétant instrument. Dans ce recueil de courts textes, Hakim Bey montre comment le bousculer en y introduisant cette forme de chaos social qu'est une véritable convivialité retrouvée.


" TAZ " - Hakim BEY


La TAZ (Temporary Autonomous Zone), ou Zone Autonome Temporaire, ne se définit pas. Des "Utopies pirates" du XVIIIe au réseau planétaire du XXIe siècle, elle se manifeste à qui sait la voir, "apparaissant-disparaissant" pour mieux échapper aux Arpenteurs de l'Etat. Elle occupe provisoirement un territoire, dans l'espace, le temps ou l'imaginaire, et se dissout dès lors qu'il est répertorié. La TAZ fuit les TAZs affichées, les espaces "concédés" à la liberté : elle prend d'assaut, et retourne à l'invisible. Elle est une "insurrection" hors le Temps et l'Histoire, une tactique de la disparition.Le terme s'est répandu dans les milieux internationaux de la "cyber-culture", au point de passer dans le langage courant, avec son lot obligé de méprises et de contresens. La TAZ ne peut exister qu'en préservant un certain anonymat ; comme son auteur, Hakim Bey, dont les articles "apparaissent" ici et là, libres de droits, sous forme de livre ou sur le Net, mouvants, contradictoires, mais pointant toujours quelques routes pour les caravanes de la pensée.


Qui est Hakim Bey ?

Avec son livre "TAZ", Hakim Bey est entré dans la légende. Il est, depuis, un héros de la contre-culture. Altermondialistes, ravers, hackers et autres rebelles lui vouent un culte secret. Pour Bey, la révolution a déjà commencé.

Au début, en 85, il y eut un livre: "TAZ". C'était la première apparition d'Hakim Bey. Le premier à avoir cru en ce brûlot, c'est Jim Flemming, fondateur d'autonomedia, une maison d'édition indépendante de Brooklyn. Depuis sa première parution en 85, TAZ a été traduit dans une douzaine de langues et s’est vendu à plus de 20 000 exemplaires. Sans compter la myriade d'éditions pirates distribuées sur le net, parce que tous les écrits d’Hakim Bey sont libres de droits. Soufisme, utopies pirates, anarchisme, terrorisme poétique: Bey le prolifique a publié des dizaines d’essais.

Hakim Bey : "C’était pas vraiment une decision sérieuse. Je l’ai écrit comme un essai je trouvais ça amusant ; c’est après que j’ai pensé que ces idées pouvaient être dangeureuses et que je n’avais peut-être pas trop intérêt à dire que j’en étais l’auteur. C’est là que j’ai pensé que créer un personnage donnerait un caractère mystérieux à tout ça. En tous les cas que ça attirerait la curiosité. Mais je n’imaginais pas vraiment à quel point. J’ai jamais essayé de créer un gourou ou un leader. J’ai jamais voulu être une star mais il y a des gens qui insistent sur le fait que j’en suis une! Alors qu’en fait c’est pas ça du tout. Au contraire pour moi la renommée c’est un truc horrible. Etre hakim Bey c’était au contraire le seul moyen de ne pas être connu. Voilà à quel point j’ai été stupide. "